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15 septembre 2010

Des vents contraires d’Oliver Adam

Des vents contraires

Lire Olivier Adam, c’est flirter au grand vent, mais dans la douceur des mots, l’histoire se faufile , les émotions nous assaillent, au pas de notre lecture, la déchirure de l’absence nous est offerte béante, et l’auteur explore les contours et la profondeur, rien ne nous échappe, ni même sa propre plongée, son quotidien à maintenir la tête hors de l’eau,  à bout de bras ses enfants, tout aussi perdus et meurtris à jamais. Une histoire comme il pourrait vous en arriver un jour ou l’autre. C’est le drame de cet homme dont sa femme disparue sans raison apparente, laisse ses deux enfants en interrogation, ils se tiennent tant bien que mal, se laissant pousser par l’espoir, qu’un jour peut-être … c’est dans ce climat d’attente, de questionnement que Paul décide de quitter Paris pour retourner dans sa ville natale, tenter de vivre ailleurs sans elle.

Page 36 : “Les jours qui suivirent me firent l’effet d’une promesse, la vie prenait des airs de vacances, les gamins dormaient tard, se levaient sans grognements ni larmes, et les heures filaient comme un long trait de lumière. On a fignolé deux trois trucs dans la maison,, dévalisé quelques boutiques, mais l’essentiel on l’a passé dehors, à profiter de la mer et du sable qui s’offraient sans compter sous un soleil suspect, trop généreux pur la saison. J’ai pris ce qu’on me donnait sans broncher, ça faisait trop longtemps que la vie nous battait froid pour rechigner. J’étais juste un peu sur mes gardes, la méfiance m’était devenue une seconde peau, la parenthèse se refermerait sans prévenir”

J’aime beaucoup son style ciselé, agréable , la manière qu’il a d’exposer les sentiments, les  souvenirs, et les sensations

Page 49 :  “J’imagine qu’il en est ainsi partout, qu’on grandit côte à côte sans jamais se croiser vraiment, méconnus et indéchiffrables. Le concret nous cimente, le quotidien nous lie, l’espace nous colle les uns aux autres, et on s’aime d’un amour étrange, inconditionnel, d’une tendresse injustifiable et profonde, qui ne prend pourtant sa source qu’aux lisières.”

Paul tente de se noyer dans le quotidien pour échapper au souvenir de Sahara qui le hante à chaque minute, mais tant que la lumière ne sera pas faite sur cette absence, le noir ne cessera de le poursuivre.

Page 52 “ Si léger qu’il fût le travail m’occupait l’esprit et remplissait les heures, colmatait les fissures et les brèches. C’était juste un vernis je le savais bien, l’illusion des premiers jours, ça tiendrait ce que ça tiendrait mais il fallait me rendre à l’évidence, pendant six heures Sarah n’avait fait que de furtives apparitions dans mon cerveau, la morsure s’était faite plus lâche, et la laisse m’avait laissé plus de mou qu’à l’accoutumée. “

Dans sa solitude douleur, il est étrangement le sauveur de bien des personnes en errance, paumées face à leur propre tragédie, il en est ainsi, comme si il attirait tous ces âmes recherchant une bouée pour s’échapper de la noyade, une oreille attentive à la souffrance humaine. C’est ainsi qu’un policier s’accroche à lui et l’entraîne voir sa fille boxer, cette fille qu’il a abandonnée, puis la voisine , Isabelle vogue sur le même rafiot que lui sans vraiment savoir pourquoi, Elise au seuil de son grand départ s’attache  à Paul, Justine ado mal dans sa famille, et d’autres encore…

L’enfance et sa fragilité se dessinent entre ce drame et le quotidien, comment des enfants doivent affronter cette évidence : leur maman disparue, comment un papa au bord de l’effondrement peut-il rester solide et porter leur avenir avec le moins de souffrance, refermer la brèche du souvenir, petit à petit , jour après jour leur donner l’espoir d’accepter une vie sans celle qui fait défaut dans ce paysage familial …

Page 173 : Quant aux enfants je  ne savais plus quoi faire, ils se contrôlaient mais qu fond ils étaient détruits. Quelque chose en eux s’était brisé que rien ne pourrait jamais réparer. On n’y pouvait pas grand-chose, les marges de manœuvre se réduisaient de jour en jour et il fallait se résigner à se tenir auprès d’eux, à les accompagner le moins mal possible, à leur apprendre à marcher avec un trou dans le cœur et du vent dans la poitrine. 

Un petit bémol :  je pense que le roman aurait gagné en intensité en allant plus directement au fait, ou un allègement j’ai ressenti des retours de vague, sans être des répétitions, mais des superflus avec tous ces personnages marqués par la vie,  cette douleur qui je le comprend doit faire son chemin, la mélancolie étouffe parfois les beaux paysages que l’auteur nous offre, la mer omniprésente, ce besoin de se gorger de grand air et d’embruns.

Alors oui, c’est triste, oui c’est oppressant mais c’est le chagrin tel qu’il est, l’absence cruelle qui mord au vif, oui c’est déprimant car c’est bien un Paul déprimé qui tente de rester sur pieds pour ses enfants, c’est rare de croiser dans les romans, cet amour paternel porté à bout de bras.

Non ce n’est pas pleurnichard, mais profond, sensible et sensoriel, c’est bouleversant et mordant, c’est la réalité d’une perte tout simplement, c’est son monde qui s’écroule.

Et toi* comment il va ton monde pour rester indifférent à la douleur humaine, n’as-tu donc jamais perdu un être cher ?

Toi*: étant tous les lecteurs qui ont lu ce livre en déposant leur âme dans un coin sombre, pensant sûrement s’émerveiller du malheur des autres.

C’est certain, mieux vaut pas lire ce livre si on a envie de rigoler, non, je pense qu’il faut lire ce livre en se laissant embarquer dans cette histoire touchante tout simplement, sans chercher pourquoi et comment l’auteur nous mène sur ces chemins de douleur.

Un bon moment de lecture émouvante.

Puisque l’histoire se passe dans une région que j’affectionne voici cette fameuse lande de cap Fréhel dont nous offre l’auteur 

IMG_1501 IMG_1536  IMGP1734

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Commentaires
P
@ caro, alors bonne dégustation, dans tous les cas, tu en parles d'une façon alléchante.. .
C
Pas autant que des vents contraire, il m'a fallu un peu de temps mais là il y a tant de soi dans ce qu'est l'héroïne que l'on avance avec elle, que l'on brûle de savoir. J'ai encore deux jours de lectures, miam.
P
@ caro, je comprends mieux, et bien il semblerait qu'il t'a plu et tenu, ça me donne l'envie pressante de l'avoir au plus vite
C
Le livre dont je parle dans "pas de deux" est le coeur régulier. J'écris rarement un billet sur les livres que je lis, je ne sais pas très bien aire cela. j'ai juste mis une citation: http://lesheuresdecoton.canalblog.com/archives/2010/04/03/17455854.html#comments<br /> <br /> Mais, je l'ai offert à une amie qui aime la mer comme moi, une blogueuse de Montréal, je vais aussi te mettre son billet en ligne: http://lucierenaud.blogspot.com/2010/08/mer-et-livres.html
P
@ Caro , je n'ai pas vu le billet sur le livre d'Adam Olivier chez toi, ou je me suis trompée de blog, avais tu fait aussi des billets pour Falaises et les vents contraires ?
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