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11 novembre 2010

La fille mosaïque de Régine Detambel

“La jeunesse, disait Marie Môme, c’est souvent un petit visage ravagé et triste, c’est abandonné, désespéré,à la merci de tout.”

Tout commence le jour de l’enterrement de Jean, victime de la guerre des gangs de son lycée à la suite d’une série de malentendus. Son amie Laetitia, se remémore les épisodes de leur amour, mais aussi leurs désaccords, la jalousie latente qui les tenait, leur amitié pour Marie Môme, bibliothécaire… Au départ, un fait de société, une histoire d’amour; a l’arrivée, un texte ciselé, stylisé, émaillé de métaphores chatoyantes.

***

Voici une auteure que je ne connaissais pas : Régine Detambel voir sa fiche ICI

***

Un petit tour à la biblio, une couverture me frappe, le titre m’interroge, la dernière phrase de la 4ème de couverture me décide… fin d’après-midi, il me reste une heure avant l’heure du dîner, j’ouvre ce petit livre de quelques 100 pages, et me voilà embarquée dans cette histoire d’adolescents au cœur d’un lycée, deux jeunes qui s’aiment, une bibliothécaire follement passionnée, une histoire de bandes, jalousie, manipulation, la violence et Jean qui la combat croyant au pouvoir des livre puis survient le drame, le deuil…

En quelques pages, l’auteure soulève le problème du mal être de ces ados, ceux d’hier comme ceux d’aujourd’hui, et cette bibliothécaire qui joue le rôle de catalyseur, épaulant Jean dans sa quête et consolant Laetitia de son deuil, un personnage pertinent et intéressant , voici un extrait de dialogue entre elle et Jean :

- Est-ce qu’il y a des livres de témoignage contre la violence et l’injustice ? il faudrait que je les lise tous.

- Tu n’auras pas assez d’une vie entière, répondait Marie Môme. Aucun livre ne peut répondre à ta place. Tu ferais mieux de noter ce que toi tu as envie de dire sur le respect, sur la justice, sur la guerre que vous menez les uns et les autres.

- C’est simple, disait Jean, ça ne peut plus durer comme ça. les élèves grandissent tous dans l’idée qu’ils se feront un jour ou l’autre tabasser au lycée.

- Tu as raison, disait Marie Môme. Ils me le disent aussi.

- Et puis les profs n’ont pas confiance en nous. Ils ont peur pour nous, comme nos parents, parce qu’ils se disent qu’on ne trouvera pas de boulot plus tard alors leur angoisse rejaillit sur nous, ils se dépêchent de boucler le programme.

- Ils font ce qu’ils peuvent. Je crois qu’ils essayent d’être conciliants et raisonnables, mais vous grondez parfois comme des orages et vous leur faites peur parce que vous ne savez rien de la vie. Vous vous précipitez dans l’existence comme si vous étiez armés jusqu’aux dents, alors que vous êtes à la merci de n’importe quel petit malin qui vend de la drogue dans une rave-party.

[…] La bibliothèque était la pièce rassurante du lycée. Toutes les folies des hommes, que ce soit l’amour ou la guerre, s’y trouvaient rangées par titres et par auteurs. Il suffisait d’ouvrir un volume pur déchaîner l’horreur. il suffisait également de refermer le livre pour que la réalité reprenne ses droits. “oui, pensait Jean, il faudrait aussi qu’elle ait des limites, qu’on puisse la circonscrire rapidement. Mais qu’on ne la laisse pas flamber sans rien faire, en regardant à terre, comme si personne ne pouvait rien contre l’incendie.”

La fille mosaïque, l’éclatement de la jeunesse dans ses interrogations, ses doutes, son mal-être, sa quête de soi : “ je suis faite de petits morceaux de moi-même qui s’affrontent.”

Ce petit bout de phrase résume en somme ce que nos ados reflètent , un affrontement plus ou moins difficile entre eux-mêmes et le monde qu’ils doivent conquérir.

Un joli petit texte, d’une plume légère, à la portée de nos ados, des personnages bien définis et trempés comme Marie Môme qui défend la cause de la jeunesse j’ai bien aimé sa remarque avec les profs :” des livres qui choquent un peu, des livres puissants, qui leur fassent peur, qui leur fassent prendre conscience de leur importance, de l'importance de leur cœur, et de l'importance de chacun de leurs mots. Donnez- leur à lire "Lolita" au lieu du Grand Meaulnes", des livres qui les nourrissent. Ils rêvent suffisamment comme ça... ”

Une petite mosaïque éclatante et sombre à la fois par ce drame… un petit livre à lire à faire lire à nos jeunes. Je suis sûre que vous serez conquis par Marie-Môme.

Combien j’aurai aimé une bibliothécaire de cette trempe à mon lycée au lieu d’une femme taciturne dont je n’ai jamais entendu le son de sa voix qui n’en avait rien à faire des lycéens, les prenait de haut, et ne venait jamais au devant d’eux pour leur transmettre l’amour des livres, la passion des mots, rien assise derrière son bureau comme réfugiée derrière un mur de désolation…

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Commentaires
A
J'ai lu ce livre il y a trèèèès longtemps. J'aime Régine Detambel, ses textes courts, comme Graveurs d'enfance, Des petits riens au goût de citron. Cela me donne envie de lire d'autres choses d'elle !
P
à l'or, oh oui je le crois aussi
L
Je crois que l'on aurait tous aimé rencontré une bibliothécaire aussi passionné...
P
@ clara, tant pis, c'est pourtant une belle histoire <br /> <br /> @ Griotte, je l'ai trouvé au rayon adulte pourtant, puisqu'il n'y a pas de rayons ados à notre biblio mais il est vrai qu'il convient mieux aux jeunes mais côté parents c'est toujours intéressant <br /> <br /> @ Alex, plus qu'idéale...
A
Une bibliothécaire idéale, quoi.
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