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25 juin 2011

L’astronome aveugle de Anne-Catherine BLANC

“Lui, l'astronome aveugle, dont la nuit scintillait de la mémoire des étoiles, le vagabond amoureux de la mer, était devenu le guide et l'étoile des marins perdus dans la nuit et la mer; et de ce destin si étrange d'apparence, mais en vérité si parfait, il goûtait la sagesse et l'ironie."

A trop scruter les astres pour le compte du roi, l'astronome a oublié de sonder sa propre vérité. Devenu aveugle, il renonce à la vie de cour pour mener une existence libre et vagabonde sur la côte, avec son chat pour seul compagnon. Il trouve un ami inespéré en la personne d'un gardien de phare et croit en finir avec l'errance. Mais seuls les rois décident du sort de leurs sujets... Voyage dans le temps et l'espace des mots, cette fable interroge le lecteur sur la vacuité et les abus du pouvoir, mais aussi sur ces choix inéluctables qui transforment, en un instant, une simple vie d'homme en destin assumé. Dans une écriture fluide, enluminée de références médiévales, un récit sensible et profond sur l'amitié, l'amour et l'accomplissement de soi.

***

3ème livre que j’ai le plaisir de lire de cette auteure, et 3ème fois  que je succombe à sa plume. Bien que ce titre soit assez différent des 2 autres “Moana blue” et Passagers de l’archipel, j’ai apprécié ce petit conte philosophique aux airs moyenâgeux. Comme tout conte, une morale se dessine de page en page, faisant sa place au fil du récit pour nous bousculer et nous enchanter jusqu’à l’ultime point final. Empli de sagesse et d’humilité, nos deux compères ont soudé une forte amitié, entre eux, ce chat et une confiance hors pair.

Encore une fois je fus charmée par la plume poétique de AC Blanc, une fois encore, je me suis régalée à découvrir cette histoire inattendue. Toute la simplicité offrant l’espace démesuré d’un chemin à explorer,  découvrir  une lecture agréable et douce, apaisante et réconfortante.

Merci à l’auteure de nous offrir à chaque livre, une perle dans un écrin de poésie.

Dans l’ambiance particulière du phare, on frémit, on apprécie, on angoisse, on se régale d’une autre époque, d’une langue aux assonances révolues et pourtant ça chantonne, ça fleure bon le paysage marin, dans l’immensité du cosmos, chevauchant les récifs, ou bien les étoiles, le ciel et la mer ont rendez-vous au doux ronron du chat témoin d’une paix retrouvée.

Page 89 : le chat continua de gronder en sourdine. Le gardien eut la sagesse de rengainer ses protestations. L’astronome, par miracle, trouva celle de rester muet.

 

Damoiseaux, demoiselles, écoutez ces paroles du temps naguère et régalez-vous !

Page 74 “ Gente dame, ne tremblez point ! Certes, du fait de ma décrépitude, je suis impardonnable d’oser seulement effleurer votre manche. Mais si ma carapace est immonde, l’âme qui s’y trouve enfouie a su rester noble et fière. Daignent vos beaux yeux, ouverts à la lumière du jour, percer l’apparence des choses et vous faire voir que vous n’avez nulle raison de me craindre ni de me fuir. “ En entendant ces mots la belle, étonnée, regarda l’aveugle, et soudain ne le trouva plus repoussant, ni effrayant. Elle fut fort surprise par la douceur de sa voix et la suavité de ses paroles, choses auxquelles ni son mari, bourgeois grincheux, ni son amant, homme de grand cœur mais de peu d’éducation, ne l’avaient habituée. “Asseyez-vous donc sur cette escabelle, reprit l’astronome en la lui présentant aussitôt car, comme beaucoup d’aveugles, il connaissait à une ligne près l’emplacement de chaque objet autour de lui. Nous n’avons point ici, reprit-il, de ces douceurs qui plaisent aux dames, pâtes d’amandes, rousquilles, tourons et autres délicates confiseries ; mais si vous vous en daignez contentez, voici quelques noix encore fort bonnes, quoique cueillies l’automne dernier, et une pomme qui elle aussi traversa l’hiver sans dam.”

 

Des aventures ou mésaventures, périples et dangers, font opposition au confinement du phare et de la chaleur de l’amitié de l’astronome et du gardien, un juste équilibre.

Un petit livre qui ne serait vous laisser indifférent au charme d’Anne-Catherine Blanc, une lecture qui pourrait être une belle occasion de renouer avec une langue oubliée, une aubaine à scruter les cieux là où le noir règne la lumière nous éblouit d’un rien. Le chaos devient vite une douce brise, alors que les vagues se fracassent avec cruauté sur les récifs de nos destins,  quelque part croire  au calme  qui règnera à nouveau. Bercés d’une force intérieure, les protagonistes affrontent leurs maux comme de preux chevaliers tout en respectant leur dignité.

Une histoire éblouissante à la plume douce et chantante, nous transportant dans une autre époque une autre dimension.

Les amoureux de nos amis à quatre pattes dotés d’une certaine intelligence difficilement acceptée par nos animaux à deux pattes, seront comblés :

page 13 : Durant la nuit, il vaquait à de nombreuses occupations, félines par essence et donc inaccessibles à l’entendement humain. On l’apercevait parfois qui cheminait pensivement sr les remparts, d’un train égal d’ambassadeur investi d’une grave mission ; parfois se découpait comme un point d’encre, sur le lavis d’un disque de lune, sa ronde et fluide silhouette surmontée de la courbe interrogative d’une longue queue annelée.  Parfois aussi, il disparaissait en quelque gouttière secrète, et bien malin qui eût alors réussi à le suivre ! Mais toujours il revenait à la chambre de la tour et aux caresses de l’astronome, qu’il semblait priser à l’égard d’un ami cher et fidèle ; et l’astronome, comme ami, lui aussi appréciait son chat.

La lecture est très sensorielle, la cécité ouvre avec amplitude les sens, les descriptions tout en finesse abondent sans démesure mais avec justesse permettant au lecteur d’être acteur, ressentir, sentir, toucher , deviner ce paysage , ces embruns, ce chemin…

Page 22 : L'astronome aveugle allait le long des quais, humant non plus l'humidité des caves qui montait des culs-de-basse-fosse du château mais celle du port, vivante, toute imprégnée d'une riche odeur de goudron, de bois et d'étoupe. Le choc léger des coques qui heurtaient les gros billots enveloppés de toile goudronnée servant de pare-battage pour les protéger de la pierre des jetées, le chant acéré de la brise dans les gréements, scandé de menus cliquetis métallique et de raclements de chaînes, le frottement monotone des lourdes amarres pétries de cordes et de sel qui se balançaient au gré du flot, emplissaient ses oreilles d'un hymne qui sonnait comme une musique céleste. Passant la langue sur ses lèvres, il y goûtait l'embrun avec volupté; si, dans ce mouvement, il happait sans le vouloir quelques rudes poils de sa moustache blanche, il croyait mâcher des algues. Il en trépignait de bonheur, comme un enfant gâté.

 

Page 40 :  Le vent, qui rassemblait ses forces, avait dispersé les nuages. L’aveugle cheminait donc à présent sous un blond et frileux soleil d’automne, le pas rythmé par le fer de sa canne et les noirs claquements de sa cape. Le chat s’était perché derechef sur son épaule, car la route allait s’élargissant sous les semelles percées du vieil homme, le terrain se faisait moins raboteux, comme à l’approche d’une grande ville : point n’était donc besoin de guide, et la brave bête goûtait un repos mérité. Une rumeur montait vers l’astronome, la rumeur amie de la mer, mêlée à celle encore lointaine de l’animation des hommes.

Un bon conseil, si vous ne connaissez pas encore cette auteure, ne loupez votre chance de lire une plume ô combien délicieuse, ne perdez pas votre temps avec des livres terriblement communs, offrez-vous des lectures tout à fait hors normes, voyagez, sentez, laissez-vous abandonnez dans l’encre majestueuse de Anne-Catherine BLANC.

A quand le prochain ? 

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Commentaires
L
Merci Pascale pour cette lecture poétique !<br /> <br /> <br /> <br /> (billet sur mon blog !)
A
Bonjour Pascal, j'ai vu chez Aifelle que tu faisais voyager ce roman. Pourrais-tu m'ajouter à la liste, s'il te plait. Merci.
V
comme Didi, c'est chez Keisha que j'ai lu que tu faisais de ce livre un livre voyageur. Je suis très intéressée, merci de me tenir au courant!
D
J'ai lu chez Keisha que tu faisais voyager ce lire, je suis intéressée si cela est toujours d'actualité.<br /> Merci et bonne soirée !
M
Je tiens à m'excuser car je suis toujours en possession du livre voyageur L'Astronome aveugle. Je m'excuse pour le retard. Je suis plongée dedans et je m'informe d'ores et déjà de l'adresse de Kathel afin de ne pas prendre davantage de retard.<br /> Merci pour ta compréhension.
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